On vous présente : Sainte Corona

Une martyre de l'Église primitive trouve soudain la gloire sur Internet... pour une raison inattendue et évidente

Récemment, une mystérieuse femme martyre du quatrième siècle de la Syrie romaine a été déterrée par de nombreux catholiques en ligne. Elle s'appelle Sainte Corona.

Qui donc est cette sainte au nom maintenant provocateur ? Et est-ce qu'elle pourrait nous aider à combattre le virus qui porte son nom ?

Pour répondre à ces questions, il faut un peu de recherches.

Les détails sont un peu brumeux. Selon la tradition, Corona (« Couronne ») fut martyrisée à l'âge de 16 ans à l'époque des persécutions contre les chrétiens, peu après un soldat romain nommé Victor de Damas.Les dates et les lieux de leur martyre sont ambigus. La plupart des sources indiquent qu'ils furent tués en Syrie romaine sous le règne de Marc-Aurèle (170 après J.-C.). Cependant, divers textes hagiographiques divergent sur le lieu de leur martyre, certains affirmant que ce fut à Damas, tandis que des sources coptes affirment que ce fut à Antioche. 

Certaines sources occidentales affirment que le lieu de leur martyre fut Alexandrie ou même la Sicile. 

Les sources ne sont pas non plus d'accords sur la date de leur mort. Corona et Victor ont peut-être été martyrisés sous le règne d'Antonin le Pieux (au 2ème siècle) ou de Dioclétien (donc quelques 125 ans plus tard). Le Martyrologe romain affirme simplement que les saints vivaient au troisième siècle.

Quels sont les événements qui les ont conduit au martyre ? Selon la légende, Victor était d'origine italienne. Il a servi à Damas, donc en Syrie romaine. Après la découverte de sa foi chrétienne, il a été brutalement torturé. En plus de lui arracher les yeux, il a été fouetté jusqu'à ce que sa peau tombe de son corps.

Sainte Corona, mariée à l'un de ses camarades, lui prodigua consolations et encouragements. Elle fut arrêtée pour ce motif et torturée à son tour. À la fin, ses bourreaux la lièrent entre deux palmiers pliés l'un vers l'autre. Son corps fut ensuite démembré lorsque les troncs des palmiers furent brusquement libérés.

C'est pourquoi, dans l'iconographie, on voit très souvent Sainte Corona présentée entre deux palmiers. La tradition est de montrer un martyr avec les instruments de sa mort, comme par exemple on représente Saint Laurent, le diacre martyr de Rome, avec le grill sur lequel il a été cuit. Les tortionnaires romains étaient très inventifs.

Entre-temps, Victor a été décapité sur ordre du juge romain. Il existe une variante de la tradition qui affirme que Victor et Corona étaient en fait mari et femme.

On porte une dévotion particulière à sainte Corona en Autriche et en Bavière orientale, où plusieurs pèlerinages lui sont dédiés : à St. Corona am Schöpfl, à St. Corona am Wechsel, au sanctuaire de sainte Corona de Staudach et au sanctuaire de Handlab, par exemple.

Charlemagne aurait rapporté les reliques de Corona avec celles de Saint Leopardus à Aix-la-Chapelle, et ces deux saints sont devenus les patrons du couvent Notre Dame d'Aix-la-Chapelle. Un reliquaire en plomb du début du 11ème siècle a été retrouvé en 1843. Après avoir été examiné, son contenu est réintroduit en 1911 dans la châsse Corona-Leopardus, dans la chapelle Saint Michel de la cathédrale d'Aix-la-Chapelle.

La cathédrale de Strasbourg abrite un vitrail du 14ème siècle représentant Sainte Corona en longue robe, avec le manteau et le voile, tenant la palme du martyre dans la main gauche.

On dit aussi, par contre, que les reliques des deux saints furent placées en 965 dans la Cathédrale de Brême. Le culte de sainte Corona y était certainement important : on y a retrouvé des broches de pèlerins et trois statues.

À Anzù, dans le nord de l'Italie (par coïncidence, une région dont on a beaucoup parlé ces derniers temps) se trouve une basilique où sont conservées des reliques de sainte Corona.

Dans les régions germanophones, la prière de Corona (Kronengebet) était un rituel magique particulièrement populaire aux 17ème et 18ème siècles. Son but était de retrouver des trésors cachés. Peut-être Sainte Corona a été choisie pour cet « honneur » ambigu à cause d'une présentation iconographique alternative de la martyre dans laquelle elle tient une pièce de monnaie. Dans l'intention des artistes sacrés, cela devait montrer que Sainte Corona aidait les pauvres. L'imagination humaine est pourtant indomptable.

On retrouve donc Sainte Corona dans plusieurs grimoires (livres de magie), y compris dans les sixième et septième « livres de Moïse ». Les sixième et septième livres de Moïse sont des textes magiques du 18ème ou 19ème siècles prétendument écrits par Moïse, et transmis en tant que livres cachés (ou perdus) de la Bible hébraïque.

Pour revenir sur un terrain plus orthodoxe, sainte Corona est aujourd'hui la sainte patronne du petit village St. Corona am Wechsel (une commune ainsi qu'une station de ski dans le sud de la Basse Autriche), dont le site signale que les habitants ont invoqué la sainte, comme cela se fait pour tout saint patron, pour être soulagés de divers maux : tempêtes, mauvaises récoltes, et tous les troubles de la vie quotidienne.

Mais l'intercession contre les épidémies n'a jamais été sa « spécialité » — au moins jusqu'à ce mois-ci !

Dans la tradition de l'Église, nous croyons qu'aucune prière n'est gaspillée. La pratique de demander l'intercession, qui consiste à demander aux saints de prier pour nous auprès de Dieu, remonte aux premiers jours du christianisme.

Corona, malgré le flou des détails de sa biographie, semble avoir existé et avoir été une sainte qui a connu la souffrance : la persécution et la douleur. Elle avait de la compassion pour Saint Victor, et c'est d'ailleurs cette compassion qui a provoqué son martyre.

Et c'est ainsi que nous pouvons le dire, peut-être en souriant mais sans ironie, « Sainte Corona, prie pour nous ! »

Statue de sainte Corona dans l'église de Sankt Corona am Wechsel, en Autriche. On voit son nom écrit dans un monogramme au-dessus de la statue. (Wikipédia)

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