Le « divin » vagabonde
- Fr. Guy
Sous mes yeux, mais sans l’avoir entièrement parcouru, un livre de parution récente. L’auteur est le pasteur genevois Blaise Menu. Son titre : « Ce qu’il reste de Dieu » pourrait paraître « accrocheur » s’il avait été choisi ou imposé par un éditeur soucieux de faire du chiffre. Une éventualité qui nous étonnerait quand on sait que cet ouvrage est édité chez « Labor et Fides », maison sérieuse s’il en est de l’univers calviniste genevois. Je pense plutôt que ce titre est un bon reflet de l’actualité religieuse, du moins de celle de notre pays. Encore faut-il l’aborder avec un regard objectif, sans préjugé.
Tout récemment encore, des sociologues au service de notre Eglise catholique en Suisse révélaient que près du tiers des habitants de ce pays s’affichent sans relation avec une institution religieuse ayant pignon sur rue. Et leur nombre ne fait que croître avec les années. Mais le plus surprenant est que seule une infime minorité de ce groupe se déclare « athée », littéralement « sans dieu ».
Voilà qui peut paraître paradoxal, mais aussi vraisemblable chez d’anciens adhérents à des confessions qui se réclament de la Bible. Car, reconnaît Blaise Menu : « La Bible transpire Dieu. (…) Elle est un livre où le divin suinte à toutes les pages, où il marque son empreinte, où rien n’échappe à sa présence » (p.9). Des traces ou des vestiges de « divin » subsistent donc chez ceux et celles qui se sont détachés des Eglises catholique et réformée dont la Bible est une de leurs sources fondamentales.
Mais que dit la Bible sur Dieu ? En craignant d’être irrévérencieux, je prends la liberté de répondre à première vue : « Tout et son contraire ». Impossible de se faire une « idée claire et distincte » de ce que la Bible nous dit sur Dieu, même si elle en parle à toutes ses pages. Des pages écrites précisément par des croyants vivant sur un millénaire, aux prises d’une histoire extrêmement mouvante et complexe, en lien avec des univers culturels et religieux très divers. D’où le sous-titre suggestif de l’ouvrage de Menu : « Vagabondage biblique ». J’interprète : on trouve du « divin » dans la Bible, comme dans d’autres traditions religieuses. Mais est-ce un « divin » malléable, adaptable à tous les goûts et à tous les appétits ?
Les chrétiens, quelle que soit leur confession, font profession de ne prier que le Dieu de Jésus-Christ, tel qu’il s’est manifesté dans les actes et les paroles de Yeshua, le fils du charpentier de Nazareth. Cet exclusivisme ne les conduit pas pour autant à juger aberrantes ou méprisables d’autres traditions religieuses qui ne font pas explicitement référence à Jésus-Christ. Chacune peut avoir son idée du « divin ». Les chrétiens ont donc aussi la leur.
Alors, une question s’impose. Les Eglises chrétiennes qui ont mission de faire connaître le Dieu de Jésus-Christ le font-elles avec suffisamment de zèle, de rectitude et de dignité ? Répondent-elles au désir de leurs adeptes désireux d’étancher leur soif à des sources d’eau vive et non auprès d’eaux stagnantes au fond de puits desséchés ?
Une réserve toutefois. Les Eglises, quelle que soit leur dignité ou leur indignité, sont-elles en mesure de faire naître à elles seules la foi au Dieu de Jésus-Christ ? Ce dernier n’a-t-il pas déclaré que seuls les « violents » peuvent s’emparer du Royaume de Dieu. Il ne suffit donc pas d’entendre un appel collectif ou personnel. Il faut y répondre encore librement, en s’engageant jusqu’aux limites de son moi. Une telle détermination ne devrait pas être ébranlée par les scandales ecclésiaux. Même si on les déplore par ailleurs.
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