Fribourg : Bienvenue au frère Anton-Marie Milh !
Au début de l'année académique, nous avons l'habitude d'accueillir de nouveaux frères à Fribourg.
La semaine dernière, nous avons présenté à nos lecteurs notre frère de Lombardie, Andrea Codignola.
Cette semaine, nous accueillons avec plaisir un jeune frère fraîchement arrivé de Flandre : le frère Anton-Marie Milh.
Comme vous le verrez, bien que jeune, Anton-Marie est un homme aux multiples talents et à une riche expérience, surtout en tant que chercheur.
Allons à sa rencontre...
Cette vidéo présente l'église historique des Frères Prêcheurs à Malines, ville natale du frère Anton-Marie. L'église est aujourd'hui une bibliothèque.
Frère Anton-Marie, bienvenue à Fribourg dans notre couvent de St-Hyacinthe. Tu es arrivé ici seulement le week-end dernier. Donc, pour nous comme pour nos lecteurs, pourrais-tu nous parler un peu du pays dont tu es originaire ?
Frère Anton-Marie Milh : Je suis Flamand, originaire de Malines (Mechelen), une ville peut-être connue par certains comme siège de l'archidiocèse de Malines-Bruxelles.
Ma famille fréquentait la paroisse de Notre-Dame au-delà de la Dyle (la Dyle est la rivière qui traverse la ville).
Dans notre église paroissiale il y a entre autre une œuvre du fameux peintre flamand Pierre Paul Rubens, « La pêche miraculeuse ».
Cette peinture m'a toujours fort impressionnée. Je crois au pouvoir des images pour parler à l'âme.
Je pourrais même dire que cette image a eu un rôle à jouer dans l'histoire de ma vocation religieuse...
Cette vidéo présente un tableau de Pierre Paul Rubens dans l'église Saint-Paul d'Anvers. Depuis son enfance, l'œuvre de Rubens a particulièrement inspiré le frère Anton-Marie.
Tu as donc été élevé dans une famille catholique, ce qui n'est en fait pas l'expérience de beaucoup de jeunes frères. Mais tous les garçons catholiques ne deviennent pas frères par la suite, mème si il y avait des tableaux de Rubens dans leurs paroisses. Comment as-tu trouvé l'Ordre des Prêcheurs?
AMM : Après avoir terminé le lycée, je suis parti à Louvain à l'université (je parle de Leuven, à ne pas confondre avec Louvain-la-Neuve) pour y étudier la théologie. C'était en septembre 2010. J'avais alors 17 ans, car mon anniversaire est en décembre.
A Louvain, j'ai pu obtenir un baccalauréat en théologie et études religieuses en 2013, un Master en théologie en 2014, ce qu'on appelle un "Master avancé" en théologie en 2015, et ensuite le Sacrae Theologiae Baccalaureus ou baccalauréat canonique en théologie, puis la licence canonique en théologie en 2015 et 2017.
Au cours de mes études, je me suis spécialisé en histoire ecclésiastique contemporaine. C'est un sujet pour lequel je ressens une vrai passion, je dois dire.
En 2014, j’ai été invité à collaborer à un projet sur l'histoire des dominicains flamands, dans le cadre du huitième centenaire de l’Ordre. Il a abouti à un livre contenant des articles sur différents aspects de la vie dominicaine en Flandre au 20ème siècle : ses initiatives apostoliques, sa mission, ses grands penseurs, et même les publications et revues qui ont été produites.
En tant qu'historien de l'Église, je dois admettre que j'ai trouvé très satisfaisant le travail de recherche et d'écriture sur ce domaine vraiment peu exploré.
Donc c'était ça ta première rencontre avec les frères...
AMM : Oui. Mais par la suite ce que j'ai découvert à Louvain, c'était une communauté de frères très accueillante et chaleureuse.
Malgré leur âge avancé, je trouve que les frères continuent de vivre pleinement leur vocation dominicaine. Je peux dire que c’est ça qui m’a probablement attiré le plus vers l’Ordre : leur exemple et leur témoignage.
En janvier 2018 je suis donc entré au noviciat à Bruxelles. Après ma profession simple je suis resté à Bruxelles pour y terminer ma thèse.
Le frère Anton-Marie nous a envoyé cette vidéo contenant un chant d'un de ses compositeurs ecclésiastiques flamands préférés, Mgr Jules Van Nuffel. Il est interprété par des étudiants de son université de Louvain/Leuven.
Tu venu à Fribourg pour étudier encore un peu plus – mais dans quel domaine ?
AMM : Je veux profiter de mon séjour à Fribourg pour parfaire et publier certains autres articles dans le domaine de l'histoire de l'Église sur lesquels j'ai travaillé ces derniers temps. Je vais aussi, je l'espère, travailler à la publication de ma thèse de doctorat pendant que je suis ici.
A côté de ça, j’aimerais étudier l’œuvre théologique de Saint Thomas d’Aquin.
En fait, j’avais déjà commencé une thèse en théologie – en l'histoire de l'Église – avant d’entrer dans l’Ordre. Après le noviciat, on m'a demandé de finir d'abord ce travail avant de partir à l’étranger pour y faire des études supplémentaires.
J'ai donc déposé la thèse en septembre, et j'espère la soutenir en décembre. La thèse traite de trois ordres religieux en Flandre au 20ème siècle – il s'agit des franciscains, des capucins, et des dominicains bien sûr – et fait le bilan de leurs réponses variées à l'occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale.
Cette vidéo présente la bibliothèque Maurits Sabbe à Louvain/Leuven, où le frère Anton-Marie a fait des recherches pour sa thèse.
Le frère Guido Vergauwen, notre prieur provincial, est originaire de Flandre. Mais tu es le seul autre frère belge de la communauté. Peut-être que pour beaucoup, leurs conversations avec toi seront un premier contact avec ta culture. Qu'est-ce que des personnes/frères d'autres cultures pourraient gagner à connaître l'expérience de l'Église en Belgique, surtout au cours des dernières années ?
AMM : En Belgique, et certainement en Flandre, nous avions jusque dans les années 60 un catholicisme « culturel » : l’Eglise avait une grande influence dans la société. Ensuite, à partir des années 70 nous avons connu une implosion, qui continue jusqu’à aujourd’hui.
Personnellement, j’ai toujours connu une Eglise « en déclin » du point de vue sociologique. Je ne suis donc pas en deuil d'un passé que je n'ai jamais connu.
Et à un certain moment j’ai pris la décision de ne pas me laisser emporter par une analyse négative.
Avec les dominicains belges, nous essayons aujourd'hui de montrer que la vie chrétienne est un chemin de vérité, d’amour, de bonheur – et tout cela est possible, même dans un contexte qui souvent ne peut pas ou ne veut plus entendre l'Evangile.
Ce projet semble extrêmement noble, mais en pratique n'est-ce pas terriblement difficile ?
AMM : Alors oui, le contexte belge est parfois un désert spirituel, je peux le dire très franchement. Mais notre mission en tant que frères dominicains est de créer des oasis dans ce désert. Nous travaillons pour créer des espaces de beauté et de paix, où les gens peuvent rencontrer le Seigneur dans les sacrements, par la liturgie, la parole, la charité, la communauté… Et nous faisons tout cela d’une manière tout humble, avec les moyens limités dont nous disposons.
Il n'est pas difficile de comprendre pourquoi cette mission te dynamise. Mais alors, je vois que tu es encore jeune. Quel avenir pour notre frère Anton-Marie ?
AMM : En effet, il faut garder à l'esprit que malgré mes études avancées, je suis encore un relatif novice sur la voie de la formation religieuse et sacerdotale.
Dans un peu moins de deux ans, c'est mon ordination diaconale qui est prévue. Si Dieu le veut, l'ordination sacerdotale suivra après.
Ce qui me plairait bien, si j'ose le dire, c'est de continuer un peu mon travail scientifique. Peut-être un jour mes recherches aboutiront en une histoire de la province belge en un seul volume.
En même temps je me sens appelé à assurer ce que l'on appelait autrefois le soin des âmes : le travail pastoral. Je dois dire que les occasions de le faire ne manquent pas — par exemple dans notre église conventuelle à Anvers !
De la Belgique à la Belgique, notre entretien a bouclé la boucle.
Merci, frère Anton-Marie !
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