Interview : frère Andrea Codignola
À la fin du mois d'août, nous avons eu le plaisir de recevoir le frère Andrea Codignola, un jeune prêtre dominicain originaire du nord de l'Italie, comme l'un des nouveaux membres de la communauté du couvent de St-Hyacinthe pour l'année académique 2020-21.
Le frère Andrea est le premier Italien à vivre à St-Hyacinthe depuis le départ du frère Gian Matteo Serra il y a quelques années, et c'est un plaisir d'entendre à nouveau un accent italien dans nos couloirs.
Voulant présenter le frère Andrea à nos lecteurs, nous sommes heureux qu'il ait accepté de s'asseoir avec la rédaction pour une courte interview. Bien sûr, cela nous a aussi donné l'occasion d'en apprendre un peu plus sur notre frère.
L'histoire de sa vocation est toute particulière et très touchante, et son point de vue sur la situation actuelle de l'Église peut surprendre. Mais nos lecteurs peuvent découvriront cela par eux-mêmes :
Frère Andrea, nous sommes heureux de t'avoir parmi nous cette année en tant que seul frère venant de l'Italie. Pourrais-tu te présenter un peu à nos lecteurs ?
Frère Andrea Codignola : Je suis fils de la province nommée « de Saint-Dominique », qui est la province de l'Italie du nord. En effet, je viens de Crémone en Lombardie. La ville de Crémone est particulièrement réputée pour son histoire et ses traditions musicales, notamment pour certains des plus anciens et des plus célèbres luthiers, tels que Giuseppe Guarneri et Antonio Stradivari.
Ma famille est catholique et, comme il est d'usage dans notre pays, j'ai toujours fréquenté la paroisse de Crémone pour la formation catéchistique et la préparation aux sacrements. Bien sûr, la perspective d'une vocation religieuse ou sacerdotale n'a surgi que bien plus tard.
Comment as-tu découvert notre Ordre ?
AC : J'ai d'abord fait la connaissance de nos moniales. Comme tu le sais, les moniales sont nos sœurs aînées, puisque saint Dominique a fondé un monastère de moniales avant de fonder les premières communautés de frères. Les soeurs dont il est question dans mon parcours ont un monastère dans ma ville natale, à Crémone.
J'avais déjà beaucoup appris sur les charismes dominicains en me renseignant sur Internet — ce qui est, je dirais, très courant pour les frères de ma génération, — et le contact ainsi que la prière avec nos moniales a toujours accompagné ma vocation.
Je suis ensuite parti pour mon noviciat à Naples, car à l'époque nous avions un noviciat commun pour les trois provinces de l'Italie.
Par la suite, je fus envoyé à Bologne pour ma formation en philosophie et en théologie. Au terme de ce cursus, j'ai été ordonné prêtre.
C'est d'ailleurs très récent : le 11 juillet de cette année. Et je suis heureux de pouvoir dire que j'ai été ordonné précisément dans la chapelle des nos moniales à Crémone qui ont toujours été proches de moi avec leurs prières.
As-tu déjà vécu à l'étranger ?
AC : Non, pas vraiment, mais j'ai souvent voyagé à l'étranger avant d'entrer dans l'Ordre. Ensuite, en tant que frère j'ai eu la chance de pouvoir participer au pèlerinage des frères étudiants du monde entier pour le Jubilé de l'Ordre en 2016. J'ai donc visité un bon nombre de nos belles communautés en Espagne et en France, dans les lieux où saint Dominique a fait ses premiers pas lors de la fondation de l'Ordre.
Plus récemment, j'ai passé quelques mois au couvent d'Oxford, et l'année dernière j'ai bénéficié d'un séjour de quelques mois chez nos frères français à Lyon.
Cependant, c'est la première fois que je viens en Suisse. Je dois dire que les frères m'ont accueilli de manière très conviviale, de sorte que ma première impression est vraiment positive, et cela demeure la cas encore maintenant (rires) !
Tu es venu à Fribourg pour étudier à l'Université pour ta licence canonique en théologie. As-tu déjà une idée concrète pour ta thèse de licence ?
AC : J'ai de nombreux intérêts qui concernent la théologie morale et fondamentale, mais c'est surtout la théologie dogmatique que j'approfondirai cette année. Je n'ai pas encore défini le titre exact de mon travail, mais je sais déjà sur quoi portera ma thèse. Je désire approfondir et analyser la manière dont saint Thomas d'Aquin recourt à la philosophie pour l'élaboration de sa théologie, en faisant quelques comparaisons ciblées et précises avec saint Bonaventure et saint Albert le Grand.
Notre couvent de Fribourg a une identité multiculturelle très marquée, et surtout au plan européen. Alors, il semble pour beaucoup que l'Église en Europe soit au bord de l'abîme. Tu es encore jeune. Comment vois-tu l'avenir ?
AC : Pour ma part, j'ai une vision très positive dans l'ensemble. Je vois en Europe beaucoup d'espoir de pouvoir redécouvrir la richesse de notre foi ainsi que notre appartenance à l'Église comme un don et comme une grâce. L'Église est notre Mère. Vivre dans l'Église, c'est vivre en communion avec la vie de Dieu et sa miséricorde.
Mais cela ne te gêne pas de voir des églises vides et des familles en crise, même en Italie ?
AC : L'Italie – et toute l'Europe en effet – semble aujourd'hui vouloir obstinément s'oublier elle-même. Elle semble vouloir oublier le sens de toute la Vérité que l'Évangile, les grands Docteurs et les Prêcheurs de la foi, en proclamant le salut, ont apporté et fait mûrir sur ces terres, jadis chrétiennes.
Mais il est certain que Dieu, pour sa part, ne nous oublie pas. Il ne peut pas abandonner son Église. Je suis persuadé que nous redécouvrirons combien le don de Dieu est précieux. Ce don nous permettra, je l'espère, de faire fleurir à nouveau le Royaume de Dieu sur ces terres qui ont déjà connu tant de bénédictions.
Merci, frère Andrea !
Nous savons que le nord de l'Italie a été particulièrement touché par le nouveau coronavirus.
Dans cette vidéo récente, deux frères du studentat dominicain de Bologne, de la province du frère Andrea, chantent « Stella caeli extirpavit », une ancienne antienne mariale contre les épidémies.
Le texte en latin ainsi que la traduction française suivent la vidéo.
Les frères chantent en latin :
Stella coeli extirpavit, quae lactavit Dominum, mortis pestem quam plantavit primus parens hominum. Ipsa stella nunc dignetur sidera compescere, quorum bella plebem caedunt dirae mortis ulcere. O piissima stella maris, a peste succurre nobis. Audi nos Domina, nam Filius tuus nihil negans te honorat. Salva nos Jesu, pro quibus Virgo mater te orat.
Une traduction française possible :
L'étoile du ciel qui a soigné le Seigneur, a éradiqué le fléau de la mort que le premier parent des hommes a planté dans le monde. La même étoile a daigné apaiser les cieux belligérants qui affligent l'humanité d'un cruel fléau de mort. O très pieuse étoile de la mer, sauve-nous de la peste ! Entends-nous, ô Dame, car ton Fils, qui ne te refuse rien, t'honore ! O Jésus, donne-nous le salut, pour lequel la Vierge Marie te prie.
Kommentare und Antworten
Sei der Erste, der kommentiert