Il suffit d’aimer

  • Fr. Guy

Jean-Marc Aveline et la mission d’une Église pour tous les mondes

Dieu a tant aimé le monde. Petite théologie de la mission. Jean-Marc Aveline. Éditions du Cerf, 2023, 159 pages.

L’auteur de ce livre est l’archevêque de Marseille.

Proche du pape François, il est aussi cardinal et sera, sans doute, électeur du futur pape.

Né en Algérie en 1958, à Sidi Ben Abbès, dans une modeste famille de Pieds-Noirs présente en Algérie depuis quatre générations, Jean-Marc et ses parents ont, comme tant d’autres, dû trouver asile en France métropolitaine après la guerre d’Algérie. Son père, employé de la SNCF, trouva un emploi semblable à Marseille. Mais le fils suivit une autre voie et obéit à un autre appel.

Jean-Marc fut ordonné prêtre à Marseille en 1984.

Docteur et professeur en théologie, membre du dicastère pour le dialogue interreligieux, il fonda et dirigea l’Institut de science et de théologie de la région de Marseille, puis l’Institut catholique de la Méditerranée.

Le titre de son ouvrage reproduit un verset de l’évangile de Jean :
« Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son Unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle » (Jean 3,16).

Cet amour divin pour le monde dans toute sa diversité et universalité est la clef de voûte de la mission confiée à l’actuel évêque de Marseille. Jean-Marc Aveline a suffisamment côtoyé les musulmans en Algérie puis en France pour savoir qu’aucun homme n’est exclu de cet amour divin. À chacun, le Père donne son Fils, qui le conduira vers l’éternelle vie.

Avant d’aborder le vif du sujet de son livre, l’auteur se plaît à relever ce qu’il appelle « les méandres de sa vocation ». Je n’en relève ici que quelques passages :
« Cet essai est une modeste contribution lentement mûrie au soleil de Marseille et de la Méditerranée, à l’écoute des appels de l’Église et du monde, enracinée dans l’amitié du Christ et le service de son peuple, et surtout ancrée dans l’invincible espérance qui jaillit du mystère pascal. »
Une très belle introduction à « la petite théologie de la mission ».

Pourquoi « petite théologie » ? Allusion au format réduit de ce livre ? Je pense plutôt à la netteté et à l’audace de ses expressions, toujours brèves et précises. Selon l’auteur, la mission n’est pas d’abord une conversion à une religion ou à une culture particulière, mais l’annonce que Dieu aime le monde tel qu’il est, et ceux qui l’habitent tels qu’ils sont. Les propos qui suivent le disent explicitement :
« Méditer sur la nature et les modalités de cet engagement missionnaire à la lumière de mon expérience au service du dialogue interreligieux, voilà ce à quoi se rattache le présent essai. »

Autrement dit, une théologie en situation. Le lecteur contemporain appréciera.

Une hypothèse traverse tout l’ouvrage : la troisième note du Credo sur l’Église, à savoir sa catholicité, pourrait être interprétée plus dynamiquement, dans un sens beaucoup plus large qu’une simple étiquette de différenciation entre les confessions chrétiennes. Il s’agit d’une catholicité en espérance qui ancre la mission de l’Église dans le désir du Jour du Seigneur, qui, selon la Lettre aux Éphésiens, récapitule toute chose sous un seul chef : le Christ.

Une perspective qui n’exclut personne — chrétien ou non chrétien, croyant ou non croyant. Une mission enracinée dans une amitié conviviale sans frontières, dont l’évêque de Marseille connaît le don et le prix pour l’avoir pratiquée depuis sa jeunesse. Il le confirme encore dans l’épilogue de son essai. Des propos lumineux, bienvenus au terme de ma brève recension :

« Sur son lit d’hôpital, ma sœur Marie-Jeanne m’avait laissé en partage ces quelques mots : “Il suffit d’aimer.” Ils résumaient toute sa vie. “La petite théologie de la mission” a été écrite en suivant ce conseil, afin d’encourager les disciples du Christ d’aujourd’hui, les jeunes surtout, à trouver dans l’amour dont Dieu aime le monde le fondement le plus solide et l’espérance la plus invincible de leur zèle missionnaire. Cette mission les porte vers tous ceux qui, sans connaître le Christ, mais par l’action de son Esprit, pressentent que, même quand on n’a que l’amour, c’est en offrant cet amour que l’on accomplit le désir le plus profond que Dieu a déposé en toute vie humaine. En faisant route avec eux, fraternellement, au nom du Christ Jésus, l’Église, appelée à la catholicité, accomplit sa mission d’annoncer au monde entier l’Évangile du salut. »

« Ce qui est premier, ce n’est pas la recherche humaine de Dieu, de quelque manière qu’elle s’exprime. Non, ce qui est premier, c’est l’amour prévenant d’un Dieu qui vient à la rencontre, demande l’hospitalité, engage la conversation. Le dialogue, moyen de la révélation, devient chemin de la mission. »

« En définitive, le plus étonnant n’est pas que les chemins des hommes vers Dieu soient multiples, mais plutôt que les chemins de Dieu vers l’humanité soient toujours adaptés à la situation culturelle, sociale, religieuse, irréligieuse, aréligieuse, athée de chaque personne humaine. »

J’imagine que certains lecteurs reprocheront à l’auteur de ne pas tenir suffisamment compte de la diversité, de la richesse profonde des approches dogmatiques quand il parle de mission. Mais comment ne pas lui donner raison quand il estime davantage la quête de Dieu vers l’homme, plutôt que l’intérêt et les procédés, souvent abstraits et littéraires, de l’homme qui veut savoir, même scientifiquement, qui donc est Dieu ?

Aveline serait-il un trouble-fête dans le Sacré Collège ? Loin de moi cette pensée !

Cette image a été créée avec l'aide de DALL·E

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