Chronique du Vallon - Décembre 2024

  • Fr. Guy

Entre foi, mémoire et quotidien.

Chorale du Vallon.
Ma voix cassée se laisse entraîner au chant programmé pour les fêtes qui viennent : « Ah la belle escalade ! » et « Ce que l’aîno » pour le 12 décembre, et le 25 : « Les anges dans nos campagnes », « Entre le bœuf et l’âne gris » et l’incontournable « Petit papa Noël » sur un air mis à la mode par un certain Tino Rossi.

De la dérision à la contemplation. À Noël, comme sur la croix, Dieu se fait dérisoire. Cette insignifiance nous sauve de la nôtre. Je me souviens de ma répulsion pleine d’orgueil à m’associer à ces chants lorsque, il y a des années, je répondais à une invitation d’une résidente du Vallon me priant de prendre part à la fête de Noël de cette institution. J’étais bien loin d’imaginer alors que j’y passerais la fin de mes jours. Et me voilà choriste cette fois-ci ! Faut-il rire ou pleurer ? Je devrais analyser ce changement de mon moi profond. Si Dieu m’en laisse le temps.

3 décembre 2024
Prédication entendue ce matin sur KTO. Il n’y a pas deux avènements de Jésus, celui de Noël et celui de la fin des temps, mais trois. N’oublions pas celui où Jésus ne cesse d’advenir dans notre quotidien : le mien, celui de ceux qui me sont proches, celui du monde écartelé entre joie et violence.

Repas avec un ami. Je lui demande comment il prie. Il me répond : Je dis simplement : « Me voici ! » Comme le jeune Samuel : « Parle, ton serviteur écoute ! »

Du cardinal Vesco, ces mots communiqués par Yvon :
« Nous sommes d’abord des frères humains. »

Le pape François a osé prendre le risque d’affirmer une fraternité humaine au-delà des appartenances religieuses. Il montre ainsi que l’évangélisation se fait dans la fraternité et non dans la conversion. C’est révolutionnaire ! Le problème n’est pas d’être peu nombreux, mais insignifiants. Les dominicains, missionnaires par vocation, n’adhèrent pas tous à ce discours. Je viens d’en faire le constat avec l’un d’entre eux. Me reviennent ces paroles de Jésus : « Je suis le chemin, la vérité, la vie. » Il faut bien une conversion pour qu’elles prennent sens dans notre vie religieuse personnelle.

Maxime stoïcienne.
Notre sophrologue nous cite cette maxime qui pourrait aussi me convenir. Il s’agit d’une prière pour obtenir la sérénité :

« Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé,
et le courage de changer ce qui peut l’être,
mais aussi la sagesse de distinguer l’un de l’autre. »

À la veille de fêter le huit-centième anniversaire de la naissance du frère Thomas d’Aquin, les dominicains et dominicaines de Suisse ne prennent pas de retard. Ainsi, les moniales d’Estavayer ont accueilli sa chasse en septembre 2024, une chasse conservée à Toulouse, si j’en crois le périodique « Liens » des fraternités laïques dominicaines de Suisse romande (décembre 2024).

La lecture intégrale de la Somme Théologique de Thomas m’a accompagné au cours de mes quatre ou cinq années de théologie « réglementaires » à la Faculté de Théologie de Fribourg. Cette lecture non seulement m’enrichissait, mais servait aussi de support quand je me lassais des cours au contenu passablement insignifiant, même si les professeurs étaient dominicains et s’affirmaient thomistes.

9 décembre 2024
Fête reportée à ce jour de l’Immaculée Conception de Marie.
Quel péché aurait donc pu maculer sa conception ? Est-ce la faute originelle chantée par le « Minuit, chrétiens ! » ? J’ai peine à soutenir cette idée, dont la trace se trouve dans la désobéissance d’Adam relatée dans la Genèse et la Lettre de Paul aux Romains. Une faute transmissible à ses descendants et dont le baptême dans la mort et la résurrection du Christ nous libère ?

Je n’irai pas plus loin avec ces commentaires qui n’ont pas leur place dans un journal personnel qui n’a aucune prétention théologique. Ce que j’expérimente toutefois chez moi et les autres humains, c’est notre propension au mal comme au bien. La mère de Jésus, choisie par grâce, a été préservée de toute attraction mauvaise et malfaisante. C’est pourquoi nous la disons « sans péché » et immaculée. Non pas parce qu’elle est humaine, mais par un choix divin qui a fait d’elle la mère de Jésus, Fils de Dieu.

J’ai participé à la messe célébrée par Pierre en l’honneur de l’Immaculée au Nouveau Prieuré, un EMS proche de St-Paul. J’ai rencontré à la sortie une paroissienne de Thônex. Elle a trouvé cette célébration un peu longuette. Je me tais sans lui donner tort ni raison. Aurais-je pu faire mieux ? J’ai comme un doute.

10 décembre 2024
Nouvelle chute à la cafétéria (glissade). Je m’en tire sans gravité. Quelques douleurs qui mettront leur temps à se dissiper. Examiné par le docteur Geinoz, qui me rassure et me réconforte, car je suis profondément découragé.

Un bon signe toutefois : l’ergothérapeute qui surveille mon bras cassé le trouve en bonne forme de réhabilitation. Puis, c’est Pascal qui m’arrive et me fait don d’un chapelet et surtout de l’eucharistie. La nuit qui suivit fut bonne et tranquille.

12 décembre 2024
Fête-anniversaire de l’Escalade.
Repas de midi avec ma sœur Jacqueline. Conversation et rencontre qui me font du bien. Que sont mes tracas au regard des siens ? Je suis au Vallon et je l’accepte sous le regard de Dieu. C’est lui mon soutien. Je m’abandonne entre ses mains.

Visite-éclair de Giulietta, lingère à St-Paul, puis celle, plus longue, de Jeannine, qui précède la soirée Escalade du Foyer. Tout et son contraire. Je retrouve avec plaisir Mesdames Golet, Monnier, et Dürrer, notre doyenne, invitée à casser la marmite et à souhaiter le pire aux ennemis de la République. Nuit écourtée par de nombreux réveils et vas-et-vient.

14 décembre 2024 (suite)
Je rentre de la matinée communautaire un peu épuisé, mais épaté par notre frère Joseph, qui m’a fait découvrir un saint dominicain portugais, Bartholomée des Martyrs, jusque-là inconnu de mon bataillon. Pour faire court, ce frère fut évêque de Braga, participa au Concile de Trente, correspondant et ami de Charles Borromée, et fréquenta notre frère Louis de Grenade, à l’instar du cher frère Oechslin, que je ne saurais oublier.

Le frère Joseph a composé, traduit et introduit nombre d’études sur le frère Bartholomée et a participé à de nombreux colloques le concernant. Son exposé m’a passionné en me faisant découvrir une panoplie de réformateurs différents de ceux qui sont vénérés à Genève. Je me demande simplement si la place de Joseph doit être au couvent de Grange-Canal ou plutôt dans une chaire universitaire d’histoire de l’Église et de l’Ordre dominicain. Tant mieux pour notre communauté qui bénéficie de sa présence. Et peut-être aussi, tant mieux pour lui.

Puis, concert de Noël animé par M. Vuilloud, flûtiste et joueur de fifre. Bonne conversation avec ce musicien malvoyant de Saint-Maurice. Il rêva un jour de devenir prêtre. Sa vocation musicale est redevable en grande partie au chanoine Pasquier de l’Abbaye du même lieu.

Ma sœur Madeleine me fait savoir par téléphone qu’elle a chuté elle aussi, trop pressée de prendre son tram. Pas de dégâts majeurs, mais fatigue.

18 décembre 2024
Espaces sur mon écran. Je ne veux pas et suis incapable de relater les absences de notifications : repas chez Madeleine, ennuis sur l’ordinateur, visite d’Alain Dupraz, du couple Geneviève et Danilo, etc.

19 décembre 2024
Fête de Noël au Vallon.
Célébration œcuménique avec le pasteur Gabriel. Chaque année Noël : quel changement ? Un enfant chaque année. Source de joies et d’espérances.

Il ne vient pas les mains vides : il nous parle et il se donne. « La grâce de Dieu s’est manifestée pour tous les hommes. Elle nous apprend à vivre dans le temps présent de manière raisonnable, attendant que se réalise la manifestation de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ. Il s’est donné pour nous, pour faire de nous un peuple ardent à faire le bien » (lecture biblique de ce jour).

Noël du Foyer. Le salon est rempli lors de la célébration œcuménique où je fonctionne avec le pasteur Gabriel. J’assure le service de la table où sont partagés le pain et le vin, Gabriel préside la table de la Parole. Puis, repas pour les résidents et leurs invités.

Les miens sont tous et toutes présents : Alex, Erik, MTK et MT Rolfo. Tout se déroule bien jusqu’à la partie musicale. Le chant « Vive le vent d’hiver » me fait fuir. MTK m’accompagne dans ma chambre et nous travaillons sur l’ordinateur jusqu’au repas du soir. Mise au point d’une chronique issue des notes de mon Journal du Vallon de décembre 2024. Cette chronique est destinée à être publiée sur mon blog. Belle journée. Vive Dieu !

« Ô désir des nations, pierre angulaire qui joint ensemble l’un et l’autre mur, force de l’homme pétri de limon, viens, Seigneur, viens nous sauver ! » (antienne de ce jour).

24 décembre 2024
Comment passerai-je cette sainte veille de Noël ? Le Foyer a son programme et Dieu le sien. L’Écriture nous dit aujourd’hui que ce n’est pas David qui lui construira sa maison. Dieu s’en préoccupe lui-même. Il passera à l’œuvre quand il le voudra et comme il le voudra. Je pense que cette maison, c’est l’humanité de son Fils, qui prend forme cette nuit de Noël. L’Homme-Jésus est la maison de Dieu. Cette maison est aussi ma maison.

À la lecture de la Tribune de Genève ce matin, j’apprends que René Recordon est décédé. Il était l’époux de ma contemporaine Hélène, née Lambert, de Seiry. Hélas, je ne dispose d’aucune référence pour lui dire ma sympathie. Mais le cœur a ses raisons et son langage que la poste ou l’Internet ne connaissent pas. Alors, je le laisse parler.

Ce matin encore, téléphone amical de Bernard Litzler. Il transmettra à Liliane Prins mes vœux de Noël. Il me parle longuement de l’abbé Jacques Haas, pionnier des médias informatiques catholiques en Suisse romande et de son activité pastorale à Lausanne. André Kolly vient de publier un livre en sa mémoire. Un souvenir me revient : j’ai eu des contacts amicaux avec l’ancienne secrétaire de l’abbé Haas, qui me fournissait des livres pour la bibliothèque du Club Rafiki dont j’étais responsable à Kigali, au Rwanda.

C’est loin tout ça ! Mais pas auprès de Dieu.

Repas et mini-promenade avec Madeleine. Puis, concert de harpe et de violoncelle entremêlé d’un beau conte de Noël. À 19 heures, Françoise prend le relais et devient conteuse à son tour. Elle puise ses sujets dans un recueil de contes de Noël rédigés par l’exégète vaudois Daniel Marguerat à l’intention de ses petits-enfants. Je l’ai présenté dans une page de mon Journal jadis.

En nous quittant, Françoise me charge de trouver « un petit Jésus » pour remplacer celui qui vient de disparaître de la crèche provençale du Foyer. Mon vœu est de lui offrir un Jésus vivant et non pas en terre cuite. Je compte sur Marie, sa mère, pour ce service.

25 décembre 2024 – Noël 2024
Au-delà du mythe et de la légende, Noël c’est JÉSUS et ceux et celles qui lui ressemblent. Ainsi au cours de la nuit, mon infirmier rwandais César, natif de Mwezi, est venu me souhaiter une belle fête et m’offre un cadeau.

Messe du Jour de Noël à St-Paul. Très beaux chants polyphoniques de la chorale. Son directeur Frédéric est aux anges. Quel bonheur de pouvoir associer ma faible voix au chant de l’Adeste Fideles!

Au repas, un invité du prieur : Samuel Sommaruga, sans doute, à l’entendre, un prosélyte catholique. Un peu trop à mon goût, mais pas à celui de tous les frères présents. Et pourtant, des ascendants très différents : son père Carlo, fondateur de l’Asloca, est militant socialiste au sein du Parlement fédéral, et son grand-père, mort récemment, fut un pilier de l’Appel de Genève.

J’ai apprécié le style liturgique et la prédication de Joseph au cours de la messe. Oui, le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous. Il nous apprend ainsi que Dieu nous aime quel que soit notre état de vie, joie ou souffrance. J’ai besoin de me savoir aimé.

Pierre me ramène à domicile et m’annonce une absence d’une dizaine de jours qu’il passera dans sa famille et à Jérusalem. Ce séjour en Palestine est-il un signe prophétique qui annonce son avenir ? Du moins, celui qu’il rêve. Quelques indices en faveur de cette hypothèse. Mais ce n’est pas mon « affaire », quels que soient mes sentiments. Mais je n’en pense pas moins.

Mon ami Jean-Michel me prie de lui dire ce que j’entends par « Verbe ». Un mot qui a sans doute été souvent répété lors de la lecture de l’Évangile de ce matin. Hélas, je ne suis pas le Père Ceslas Spicq, si brillant en cette matière. Je fais allusion à ses cours sur le Prologue de l’Évangile de Jean que j’appréciais il y a plus de cinquante ans. J’étais alors étudiant théologien en culottes courtes.

31 décembre 2024
Jour férié à Genève. On ne fête pas liturgiquement saint Sylvestre, mais la restauration de la République malmenée pendant deux décennies par l’armée de la révolution française et celle de Napoléon. La ville du bout du lac devient suisse à part entière. Ce que confirment le débarquement de soldats confédérés au Port Noir et un monument symbolique au Jardin anglais : deux femmes s’embrassent. L’une d’âge mûr, l’autre encore jeune. Longue vie au nouveau couple !

Quant à mon Journal, qui vivra verra ! Par contre, je pourrais être plus précis pour informer sur la provenance des livres que je présente sur mon blog Dominicains.ch. Si mon Journal est personnel, mon blog est public. Deux sources principales sur les publications récentes : le bulletin Prêcheurs et Labor et Fides. Ma vocation de prêcheur va de pair avec mon intérêt œcuménique.

Cette section de mon Journal coïncide avec la fin de l’année 2024.

Alors, pour tous et toutes, bonne année ! Et que Dieu soit céans !

Frère Guy Musy, dominicain

Cette image a été créée avec l'aide de DALL·E

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